mardi 13 octobre 2015

5. La Mission: se battre

En lien avec la Journée missionnaire mondiale, je continue à publier une série d'articles sur "la Mission". Articles qui ont dû servir de méditation sur RCF Vaucluse, récemment.



4. La Mission:  se battre.

Pourquoi laisser le monopole de la lutte sociale aux syndicats? A force d'affirmer que la religion est une affaire privée, on en oublie que le travail du chrétien est aussi d'aider les sociétés, les civilisations, les cultures, à se mettre toujours plus et mieux au service de l'Homme et de tous les hommes. Si un  jour par malheur nous oubliions de lutter contre l'injustice, nous serions infidèles à notre Evangile et au Dieu des prophètes.

Cela revient à dire que la Mission n'est jamais un long fleuve tranquille! Elle exige de nous des réserves d'indignation énormes, comme disait Mr Wiesel. Elle suppose que nous dépassions nos peurs, comme l'ont dépassé le pape François et ces courageux prêtres italiens qui osent affronter la mafia et la ndranghetta.... Au Nord-Cameroun, des responsables étaient venus chez le sous-préfet de Méri,  protester au nom des paysans. Ce monsieur voulait obliger les gens à tresser des nattes qu'il irait revendre ensuite au Tchad pour son propre compte. Interloqué par la démarche des responsables, l'administrateur demande :"Qui vous paie pour venir ici  mettre le désordre?" Et eux de répondre :"Personne ne nous paie. Mais dans notre livre c'est écrit que personne ne doit écraser les pauvres." Réponse imparable, que le sous-préfet ne put parer!

La lutte pour la justice fait partie du ministère du prêtre. Elle fait partie de la Mission de tout chrétien. Au Nord-Cameroun, les Comités Justice et paix marchaient très fort. Ici ils travaillaient à l'apaisement de conflits ethniques après des pogroms en ville; là, ils aidaient une veuve à gagner son procès contre un groupe de spoliateurs (un Procureur de la République faisait partie du groupe!). Les officiels et autres grands étaient parfois bien embêtés. Ils auraient préféré que nous ne dépassions pas la porte de la sacristie, que nous nous bouchions les oreilles pour ne pas entendre les cris des spoliés, des violés, des rançonnés, des écrasés. Non, la vie d'un disciple du Christ n'est jamais un  long fleuve tranquille!
Si les Etats se soucient de mieux en mieux du respect du Droit, tant mieux. Tant mieux si le respect de l'autre gagne chaque jour du terrain sur la violence. Mais ce n'est pas gagné, et nous avons du pain sur la planche, nous chrétiens, pour lutter  avec les hommes de bonne volonté contre la corruption, pour dénoncer le tout-marché, pour parler au nom de ceux qu'on empêche de parler.

Nous ne sommes pas des anges, loin de là! Alors commençons par nous battre contre notre propre injustice. Ici, à l'intérieur de l'Eglise, au sein même de nos familles et de nos entreprises. Souvenons-nous que Las Casas, Gandhi, Martin Luther King font partie du patrimoine de l'humanité tout autant que don Helder Camara, que le P. Popiélusko. Mais ceux-là ont eu d'abord un impact énorme sur leur propre peuple, sur leur propre Eglise. Oui, la lutte fait partie de la Mission. Mais comme Gandhi, regardons plus loin que la défense des opprimés. Pour le "bapou" indien, il s'agissait en définitive,  de gagner le cœur des oppresseurs...

Encore une fois, nous retrouvons le coup du sel de l'Evangile. Après tout, Jésus n'a pas dit :"Vous êtes le sucre de la terre" mais "Vous êtes le sel."

1 commentaire:

Unknown a dit…

Très intéressé par vos réflexions