dimanche 20 novembre 2022

A quelque chose malheur est bon

 

             Oui, les scandales qui secouent l’Eglise ont ceci de bon : tout le monde se dit : « Alors, qu’est-ce qu’on fait ? » Ou bien on quitte le bateau avant qu’il ne coule, ou bien on appelle à  une réforme en profondeur.   

            Cette réforme est plus ou moins entre les mains de nous tous, mais elle ne nous lance pas dans les nuages. Tout le monde sait que l’Eglise est une chose sainte, mais qu’elle est entre les mains d’hommes pécheurs, avec lesquels l’Esprit Saint a fort à faire. C’est come ça depuis St Pierre ! Donc, la seule attitude vraiment responsable est de faire avec, en travaillant pour que ça change,  pour que l’Eglise soit moins boiteuse. On va y travailler bravement, dans la clarté.

            Un constat : ces histoires de mœurs contribuent à faire descendre le prêtre – et l’évêque – de leur piédestal, de leur sacré. Cela leur fera le plus grand bien de rejoindre le peloton de ceux eu celles qui peinent dans la plaine, avec leurs problèmes d’argent, de famille… et avec leurs défauts !   A quoi cela sert-il de se crisper sur l’identité du prêtre ? Les chutes n’en seront plus que retentissantes !

            Voilà en négatif une première réflexion. Une autre, plus positive peut-être, serait de prendre à bras le corps le problème du statut du prêtre. D’abord, la formation des jeunes. Il semble que bien des séminaires (pas tous) contribuent à former des êtres à part, aseptisés, sacrés. Souhaitons fortement que les jeunes prêtres ne soient pas seulement sympas et sportifs, mais qu’ils soient aussi ouverts et audacieux, moins liturges et plus inventifs, moins hommes d’appareil et plus autonomes, prêts à retrouver les intuitions du Concile Vatican 2 sur l’Eglise servante et pauvre.

            Autre chose. Il faudra bien poser,  et on le souhaite au plus haut niveau, encore et toujours, la question que tant de chrétiens se posent : celle du célibat du prêtre et celle de l’ordination des femmes comme diaconesses ou prêtres.   Sortir de la mentalité « coutume immémoriale » pour penser l’Eglise du 21èmesiècle. Bien sûr cela ne résoudra pas tout, et il y aura encore d’autres scandales, il y en a eu depuis le début de l’Eglise. Mais un jour ou l’autre il faudra faire sauter les verrous qui, à la longue, finissent par devenir d’une bêtise inconcevable. L’Eglise n’est pas « du monde » disons-nous ? Mais, entre autres, pourquoi ne regarde-t-elle pas un peu plus la place des femmes dans le monde d’aujourd’hui, en politique, dans les affaires, voire dans les autres confessions chrétiennes ??? Sur ce chapitre, « le monde » aurait bien des choses à apprendre à l’Eglise, ne lui en déplaise !

            Des voix de plus en plus nombreuses se joignent à ceux qui crient « Faut que ça change ! »... Ce que je dis là n’est pas bien construit, n’est pas bien pensé. Mais ce ne veut être qu’un cri ; dans certaines circonstances, un cri vaut mieux que mille discours. Quand la maison brûle, on ne va pas s’asseoir pour discuter pourquoi et comment le feu a démarré.

            Si d’autres pensent comme moi, on ne sera jamais de trop pour enfoncer ensemble le même clou !

jeudi 17 novembre 2022

1. Il y a des mots précieux.

 Nous commencons aujourd'hui ,une nouvelle série de réflexions sur "la liberté". Réflexions que vous pouvez retrouver dans un petit livre récent que je viens de publier :"Les choses de la vie" (me le demander). Toujours dans l'idée que les plus petites choses de notre vie, ont toutes un parfum d'éternité.


            Il y a des mots précieux, qui disent les trésors que nous portons. Parmi ces mots, il y en a un si fort, si beau, si vrai, que nous ne nous lassons pas d’en parler : la liberté.

            Quand on parle de liberté à un français, il pense tout de suite : Révolution, Libération. Ce sont des mots qui nous font vivre encore aujourd’hui… Mais on a un peu tendance à mettre la liberté à toutes les sauces !!! En mai 68, on entendait : « Il est interdit d’interdire ! » C’est un peu bébête, car en clair cela veut dire que chacun est libre de faire ce qu’il veut. C’est très bien, mais alors toute vie en société devient impossible, car – rappelons-le – ma liberté s’arrête là où commence celle des autres.

            Disons-le crûment : pour parler bien de la liberté, il faut en avoir été privé. Privé pas pour huit jours, mais pour des tranches de vie que l’on ne retrouvera plus : dix ans et plus. Quand on lit « L’archipel du goulag » de Soljenitsyne, on comprend ce que peut être une vie d’esclave. Nous autres occidentaux, nous ne savons plus ce que signifie être enfermés, la peur au ventre, être torturés sur fond de désespoir, des années durant.  Des gens arrachés à leur maison, comme ça, sans motif clair, et condamnés à 10 ans, 15 ans. Quand ils en sortaient, on les rejugeait, et va pour 10 ans de plus…  J’étais à Prague en 1987 ; juste avant la « Révolution de velours ». Passant devant une caserne russe, j’ai ramassé un petit pavé et, héroïquement,  j’ai écrit dessus « svoboda », liberté… Je n’ai eu droit qu’au sourire bonasse de la sentinelle. Mais les tchèques, à voix basse,  parlaient de la France comme d’une sorte de paradis, et le Printemps de Prague comme d’une espérance perdue. Le phare des jeunes, c’était Taizé.

            Nous allons essayer de creuser encore ce que veut dire liberté. Car cela va profond, plus profond qu’une devise sur le fronton d’une mairie. Si la liberté nous tient tellement à cœur, c’est qu’elle atteint le cœur de notre vie, l’intérieur de chacun. Cela va plus loin que les pavés de mai 68 ! Au vrai, c’est notre dignité d’homme qui est en jeu. Aucun enfant de Dieu ne peut vivre sans liberté. Une personne qui, telle Angéla Merkel, a vécu 30 ans dans un pays privé de liberté, sait d’expérience que la liberté est un trésor. D’où ses réactions face à la Chine, aux populismes.

            Sans aller si loin,  disons qu’aujourd’hui encore, on peut devenir esclave – en langage moderne : accro à la société de consommation !  La boulimie peut devenir un fer aux pieds,  et l’argent facile.

            Une image qui  ne cesse de m’habiter : les chevaux de Camargue. Tous ces Crins Blancs, crinière au vent, galopant dans le petit matin, à la fois puissants et légers : une merveille ! Ils ne sont attachés à rien, ne doivent rien à personne. On dirait qu’ils sont là pour faire vivre le paysage. Ces chevaux sont pour moi un symbole de liberté. Si aujourd’hui nous redécouvrons la vie sauvage, n’est-ce pas aussi un rêve de liberté que nous poursuivons ?