Sur les
marchés africains, on te propose un prix. Après, il faut marchander. Et si tu
ne marchandes pas, on te prendra pour un blanc, ou pour un naïf qui ne connaît
pas la vie… On te dit un prix, et s’en suit tout un jeu de scène ; c’est la guerre des
nerfs : départs outrés, appels contrits du marchand, jusqu'à ce qu’on
s’entende.
Avec Dieu, on ne marchande pas. Marion
Muller-Collard dit que Dieu n’accepte pas les contrats, il n’est attaché à
aucun contrat, il est libre. Et Marion, dans « l’Autre Dieu », avec
son enfant malade, revit littéralement l’histoire de Job.
Le livre de Job est long. Nous savons ce qui est arrivé à Job, un bon type, un ami de Dieu, honnête, pieux et tout et tout. D’ailleurs cela se voyait : tout lui réussissait !.. Et puis c’est la cata ! Job perd tout. Et, tout au long de cette histoire, les amis de Job essaient de le raisonner : « Tu as dû faire une grosse bêtise pour que Dieu t’ait lâché. Ce faisant, tu as rompu le contrat que tu avais passé avec Dieu. Tu ne dois t’en prendre qu’à toi-même ! » Et Job, obstinément, de protester de son innocence. Alors, au fil des pages, Dieu prend la parole et daigne expliquer…qu’il n’a jamais fait de contrat avec Job! Dieu est libre. Avec Job, il n’y a jamais eu de donnant-donnant, ce jeu minable où Dieu se mue en commerçant. Quoique… l’Ancienne Alliance ait toutes les allures d’un contrat !
Bien des
gens ont du mal à comprendre que Dieu est libre, absolument. Ils pensent faire
un contrat implicite avec Lui : « Si
je fais bien, tu me fais du bien. Si je fais mal, tu me punis. » Des
millions de chrétiens pensent comme ça. Or ce n’est pas ça, mais alors pas ça
du tout ! Ecoutons Marion Muller une fois encore : « Jésus de Nazareth a payé de sa vie d’avoir
fait voler en éclats les enclos de religiosité qui contraignaient son Dieu
immense à n’être que le pauvre signataire d’un contrat. » (L’autre
Dieu p 98). Nous libérons Dieu, et nous nous libérons par la même occasion.
Il y a des
signes de la liberté de Dieu, entre autres la gratuité. Voyez vous-mêmes : pourquoi Jésus a chassé les
marchands du Temple (Marc 11) ? Parce qu’on n’achète pas Dieu, on
n’achète pas l’amour de Dieu. Dieu nous aime, pas parce que nous sommes gentils et pleins de mérites, mais pour que nous répondions à son amour.
En clair, Dieu nous aime parce que… c’est nous ! Pas d’autre
explication : c’est pour rien, c’est gratuit. C’est une affaire d’amour.
Allez demander à tel garçon pourquoi il aime telle fille ? Bien souvent il
ne saura que répondre.
Il faut absolument
sortir du donnant-donnant… Un jour au marché, un homme vendait de l’ail. Or
c’était en temps de famine, et il bradait son ail pour acheter un peu de mil
pour ses enfants. Je lui demande : « Comtien ton ail ? – 50 frs CFA le kilo. » Je réponds : « Non, je ne te l’achète pas à moins de 100
frs. » Vous auriez vu la tête des gens !
Nous avons
du mal à accepter que Dieu nous aime pour
rien. Alors peut-être est-ce notre mission de chrétiens de montrer que,
dans ce monde où tout s’achète et se vend, la gratuité dans notre amour des
autres est l’image de la liberté de Dieu. L’heure du bénévolat a sonné depuis
longtemps. Une belle réflexion du P. Varillon : « Embrasser une joue jeune et fraîche, c’est
agréable. Mais embrasser un lépreux, c’est de l’amour gratuit. »
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