lundi 18 octobre 2010

trente mille jours


Dieu que la langue française est belle! Ce n'est pas chauvinisme que de le dire; je suppose qu'un anglais déclamant un poème de Keats, ou un italien lisant la Divine Comédie dans le texte, pourraient en dire autant de leur langue...

Je suis en train de lire "Trente mille jours", de Maurice Genevoix. Et je me régale, pas tant pour le récit que pour le pur plaisir de lire du bon français, de l'excellent français. J'avais lu avec délectation "La dernière harde" quand j'avais 17 ans; 60 ans plus tard, c'est le même émerveillement: nous avons affaire à un orfèvre en la matière.

Ne pensons pas qu'écrire soit facile! J'imagine le travail de romain que cela représenta pour Mr Genevoix: chercher les mots exacts pour décrire les chatoiements de la Loire, ou le friselis des petits d'hirondelle (qu'il nomme joliment hirondeaux) sous le toit, respecter le rythme des phrases, des expressions, tout cela ne se fait pas en un tour de main. Résultat: le texte ne parle pas, il chante. Comme une toile de Monet. Existe-t-il aussi un impressionnisme du langage?

A vrai dire, au jour d'aujourd'hui on a du mal, sinon à goûter, du moins à comprendre le style de Maurice Genevoix. Non qu'il soit passé de mode, mais nous sommes au temps du "fast": on consomme de l'info, on n'a plus le temps de déguster un vrai livre. Pire: on a un oeil sur la télé et un autre sur le journal, ce qui est pour le moins acrobatique!

Je ris de moi-même qui n'arrive pas à finir mes mots: info, télé, parce que je veux vite arriver au bout de mon propos... Heureux ami Loïc, à qui jamais vous ne ferez dire "frigo", mais "réfrigérateur".

Heureux ceux qui prennent le temps de dire, ou de vivre.

samedi 2 octobre 2010

amitié

Je regardais l'autre jour une Petite Soeur de Jésus (P. de Foucauld), évoluant dans la maison de convalescence où elle se reposait après une opération difficile. Rieuse, à l'aise avec tout le monde, attentive à l'histoire de chacun, elle diffusait autour d'elle une ambiance d'amitié légère, un je-ne-sais-quoi qui donne envie de vivre, une sorte de lumière qui éclairait le visage de chacun et de chacune en ce lieu au demeurant pas trop passionnant.


Et je me disais: communiquer sa foi, c'est ça. La foi ne se transmet pas - pas seulement - par la tête, mais par le coeur... La catéchèse est de l'ordre de l'enseignement, mais la foi est de l'ordre du témoignage. Un homme peut avoir une grosse Bible complète dans ses rayons, il a beau faire quatre ans de catéchèse, écouter trente-six homélies, toutes ces petites choses ne peuvent constituer, au mieux, qu'un éveil à la foi; si elles restent au niveau du chapeau, elles ne donnent pas la foi. Il faut que le coeur soit touché.


Le coeur est touché à partir de témoins que l'on voit vivre. Ensuite, la lecture de la Bible, les entretiens, la réflexion et la prière alimentent la foi et la rendent plus personnelle, plus éclairée. Pour le rationaliste pur et dur (si cela existe), pour le scientiste qui "ne croit que ce qu'il voit", la foi restera absconse, c'est sûr! Car avec elle, on entre dans le monde du symbole. L'amitié est de l'ordre du symbole, le coeur ne se voit qu'à travers le sourire.