jeudi 23 février 2017

5. La dernière porte.



Cette 5ème méditation s'inspire d'une homélie donnée le jour de Pâques 2016 en l’église St Laurent des Accoules (Marseille)

La dernière porte que Jésus a ouverte, c'est la porte de la mort. En Romains 5/12, on lit :"... et ainsi la mort a atteint tous les hommes." St Paul ne fait que traduire une évidence. Tous promis à la mort! Il y a comme un enfermement dans la mort, qui - nous dit la Bible - nous vient d'Adam.

Or Jésus, par sa résurrection, a ouvert la porte de la mort! Mieux: il l'a sortie de ses gonds et l'a emportée, si bien que plus personne n'a pu la refermer!... J'aime bien ce dessin de Piem où Jésus sort en emportant la porte, malgré un cri général derrière lui :"La porte!" Car, malgré la résurrection, des gens continuent à faire œuvre de mort, ils continuent à enfermer les hommes dans la haine, dans la pauvreté, le fanatisme, et le refus de la liberté. Tout comme les docteurs de la Loi enfermaient les hommes dans la Loi. Mais l'amour a vaincu la mort, et la haine n'aura plus le dernier mot.

Jésus a ouvert les portes de la mort, et depuis la résurrection, Dieu a mis la mort dans sa poche, au point qu'elle est devenue passage vers la vie. Quand Jésus ressuscite la fille de Jaïre, il dit aux gens :"Ne pleurez pas, elle dort." Marc 5/39. Façon de dire que la mort est comme un sommeil, qui toujours est suivi du réveil. Ensuite Jésus dit :"Eveille-toi!" ou "Réveille-toi!" Tout simplement. C'est le même mot en grec que pour la résurrection de Jésus :"Il s'est réveillé d'entre les morts."
Et après, c'est le coup de vent de la Pentecôte. Un sacré coup de vent "qui remplit la maison où ils (les apôtres) se tenaient". Forcément, puisqu'il n'y avait plus de porte! Matériellement peut-être, spirituellement certainement... Ah si! Il reste alors une porte, la seule: c'est le Christ lui-même, à la fois Porte et Chemin vers le Père, comme dit St Jean  au chapitre 10 de son évangile. Il est à la fois Porte  et celui qui passe par la mort pour entraîner ses brebis vers la liberté.... Ce que je dis là n'est pas de la poésie, c'est à prendre au pied de la lettre. On ne  peut rien comprendre à la joie des chrétiens si on ne saisit pas l'éblouissement qui a saisi les apôtres et les a lancés sur la route de la Mission.

Et l'Eglise après Jésus? Jésus avait dit à Pierre :"Sur cette pierre je bâtirai mon Eglise, et les portes de l'enfer n'auront pas de force contre elle." Bien sûr, cela veut dire que l'Eglise sera plus forte que l'enfer. Mais il y a un autre sens possible: avec Jésus ressuscité, l'Eglise a la force d'ouvrir les portes de l'enfer (ou de la mort selon les traductions). Et là, la porte ouverte prend un parfum de libération! Autrement dit, chaque fois que tu ouvres ta porte à un pauvre, ou à ton voisin, ce sont les portes de la mort que tu enfonces!






dimanche 12 février 2017

4. Laisser une porte de sortie.

Voici le quatrième article de la série "Jésus ouvre la porte".


En lisant Matthieu 5/21-22 :"Vous avez lu qu'il a été dit aux ancêtres :"Tu ne tueras point... Et moi je vous dis...", on se rend compte que Jésus s'oppose au meurtre virtuel, le meurtre "dans la tête". Un crime bien caché mais réel, simplement contrecarré par les circonstances. Mais Jésus va plus loin: il recommande aux protagonistes de faire un bout de chemin ensemble, un véritable "pas de deux", histoire de prendre le temps de calmer la colère et discuter calmement (Mt 5/25).
Cela pose la question de l'après-conflit, si importante dans les relations humaines. A l'issue d'une guerre, il y aura forcément un vainqueur et un vaincu. Le premier pourra  écraser le second, le tuer virtuellement; ainsi, il le laissera accumuler rancœur et désirs de vengeance dès que l'occasion s'en présentera.
Exemple en 1919. Après la Grande Guerre, le président Wilson et Aristide Briand étaient d'avis de ménager l'Allemagne. Face à eux, Clémenceau voulait au contraire alourdir les sanctions, ce qui -pensait-il - pousserait l'Allemagne à ne plus recommencer. La fessée après la raclée, en somme. L'avis de Clémenceau prévalut, entrainant une rancœur allemande qui déboucha à terme sur Hitler et le nazisme.

Or, en diplomatie comme dans la vie courante, il s'agit, à l'issue de toute crise, de permettre à l'autre de sauver la face. C'est, en quelque sorte, lui laisser une porte de sortie; son honneur sera sauf, ce qui psychologiquement sera l'essentiel. Toutes les chances seront alors réunies pour reconstruire ensemble. Tel fut le coup de génie de la réconciliation franco-allemande après la 2ème guerre mondiale. Avec bonheur, la diplomatie, le calcul et l'intérêt bien compris se rencontrent avec l'Evangile et la paix apportée par le Christ. Et dans la culture orientale er africaine, sauver la face est toujours primordial.

Ceux qui ont la vue trop courte crieront à la compromission et au recul honteux, mais le chrétien sait qu'à l'instar du Christ, il doit toujours voir plus haut et plus loin. Cela n'est possible qu'en sortant de la spirale de la violence pour entrer dans celle de la sagesse. Ainsi de Gandhi qui permit aux anglais non seulement de sauver la face, mais encore de s'en tirer avec honneur... Voilà des exemples typiques où l'esprit de l'Evangile a rencontré l'Histoire!
Il en est de même dans la vie de famille. Quand monsieur et madame se disputent - ce qui arrive toujours, même dans les familles chrétiennes - , surtout surtout qu'il n'y ait ni vainqueur ni  vaincu! Que chacun ménage à l'autre une porte de sortie où son amour-propre sera sauf.
Oui, dans ce passage de l'Evangile de Matthieu, Jésus voit plus loin, plus haut que nous autres gens de la terre. Avec Lui, il n'y a plus ni vainqueur ni  vaincu, il y a deux frères qui poussent ensemble la porte de l'amour.