dimanche 20 juillet 2014

L'art du compromis




De temps en temps on tombe sur un article qui fait tilt. Ainsi de ce que vient d'écrire l'israélien Etgar Keret dans Le Monde des 13-14 juillet derniers, à propos du Proche-Orient.
Quand on regarde Israël et la Palestine, on a l'impression d'un match où quelques-uns s'ingénient à jouer les prolongations. Traités mis au panier, implantations sauvages,  intifadas à répétition, mort des enfants etc... Alors que l'immense majorité des gens, qu'ils soient israéliens ou palestiniens, n'aspirent qu'à vivre en paix. Mais là, comme toujours, ce sont les "grandes gueules" qui gagnent. Or nous n'avons que faire des grandes gueules; nous avons le plus grand besoin de grandes voix, genre Adenauer ou Itzhak Rabin qui paya de sa vie sa passion pour la paix.
Chaque dimanche ou presque, on prie pour la paix. C'est bien, mais à force, cela devient un peu incantatoire! Ne faudrait-il pas préciser un peu? Par exemple :"Seigneur, inspire israéliens et palestiniens pour qu'ils fassent chacun un  pas vers l'autre en cherchant des compromis."
La diplomatie, la bonne, celle qui cherche le dialogue, c'est l'art du compromis. Accepter de perdre des plumes pour voler plus haut, plus loin ensemble. En dehors de cela, il reste l'équilibre dans la terreur, rien d'autre. Voyons bien que la diplomatie ne regarde pas que les relations internationales; elle peut, elle doit entrer dans les familles, dans les affaires de ceux qui sont en responsabilité, voire dans la vie personnelle.
Concrètement, que faire? Ma foi, voici quelques points, il y en a sûrement d'autres!
1° arrêter les procès d'intention. Pour démolir une collectivité, rien de tel que le soupçon, les ragots, les campagnes de presse perverses, les insinuations malveillantes.
2° faire taire les grandes gueules, ces boutefeux. Mme Leclère a été condamnée pour injures à caractère raciste envers Mme Taubira. Elle aurait pu être poursuivie aussi pour atteinte à la sûreté de l'Etat! Il faut combattre tous les intégrismes, chrétiens, juifs, musulmans, hindous, chez qui la bêtise fait bon ménage avec  le fanatisme. Ce qui les rend doublement dangereux.
3° apprendre à se mettre à la place des autres. Cela devrait devenir un réflexe! Activer la culture de la tolérance, du compromis. Chez les jeunes, accepter les compromis n'est pas naturel. Et pourtant, avec le temps, ils doivent se rendre compte que le monde se construit dans le dialogue, qu'il a soif de rencontres vraies.
J'aime bien, pour finir, ce passage de Gabriel Ringlet (saint Gabriel tellement je le cite souvent), sur les Béatitudes:
                "Il disait encore:
"Bienheureux vous les sculpteurs de paix
                       vous les tendres
                       vous les têtus de la douceur,
                       vous faites reculer l'intégrisme."

mercredi 2 juillet 2014

3. Le croyant, homme de terrain




Le croyant chrétien est un homme de terrain. Pourquoi? Parce que Jésus a été un homme de terrain. Il n'est pas resté dans les gradins à regarder ces pauvres hommes qui se débrouillent là-bas en bas, il n'a pas été qu'un supporter de l'amour, mais il est descendu sur le terrain, et quel terrain!
Regardons les évangiles. Jésus a parlé dans la synagogue de Capharnaüm :"L'Esprit de Dieu est sur moi etc..." Oui, mais après, Jésus est sorti de la synagogue. S'il s'était contenté de parler dans les églises, il n'aurait jamais rencontré la samaritaine, il n'aurait pas touché le lépreux, il n'aurait pas pleuré avec Marthe et Marie.
Quelquefois on est fatigué d'entendre des discours :"Moi mon père, je pense que, je crois que..." C'est très bien de penser, merci; mais ce qui intéresse Dieu, c'est ce que tu fais sur le terrain, dans ta vie concrète. Es-tu un chrétien de salon ou de terrain?
Oui, le chrétien est un homme du "vivre-avec". Le pape François vient de définir l'Eglise comme "une Eglise qui sort". Il s'agit de quitter son confort, ses certitudes, pour croire avec tes pieds en allant à la rencontre des autres, croire avec tes mains en aidant, croire avec tes oreilles en écoutant ceux qui ne pensent pas comme toi... J'ai eu un choc quand j'ai lu dans l'Exhortation de François :"Il y a des chrétiens qui se tiennent à distance des plaies du Seigneur." C'est fort, et c'est vrai: il m'est arrivé de faire un détour pour éviter une léproserie et ses odeurs terribles. Ai-je été un croyant de terrain? Ai-je évité la croix?
Le croyant chrétien, est donc un  homme de terrain. C'est aussi un homme tout-terrain. En termes mécaniques, je dirai que c'est un 4x4 de l'Evangile. Cela veut dire qu'il a un cœur grand comme le monde, capable de quitter sa culture et sa chaumière pour aller aux frontières de la foi. Pas d'abord par souci d'évangéliser, mais parce qu'aux frontières de la foi, l'Esprit-Saint l'attend. Il l'attend, mais il ne l'a pas attendu pour agir dans le cœur des non-chrétiens. Souvenons-nous de ce que disait Jésus en parlant de l'officier romain, un "païen" pur sucre chez qui les vrais juifs n'entraient même pas :"En vérité je vous le dis, jamais je n'ai trouvé une telle foi en Israël (Mt 8/10)... Ce qui n'a pas plu à tout le monde.
Oui, pour faire du tout-terrain, il faut quitter son autoroute favorite. Je me souviens d'une laïque missionnaire, au Cameroun depuis deux ans. Elle n'arrêtait pas de dire :"Chez nous en Bretagne... Chez nous en Bretagne..." J'ai fini par lui demander :"Hé, quand descendras-tu de l'avion?"
Avoir un cœur grand comme le monde, c'est encore être un croyant chrétien.