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1.
La Mission, c'est sortir
"Sortir": le mot a été mis à la mode par le
pape François. La Mission, c'est sortir.
Oui, mais pour aller
où? Pour faire quoi?... Pas d'abord pour prêcher qu'il faut se convertir, pas
d'abord pour "annoncer la Bonne Nouvelle" comme on dit en langage d'Eglise.
Mais d'abord pour rencontrer les gens, essayer de comprendre ce qu'ils vivent, et même
parfois vivre avec eux, au milieu d'eux,
comme eux. Quand les petites Sœurs de Foucauld partent à Calais, elles n'y vont
pas avec la Bible à la main, elles y vont pour rencontrer les migrants qui s'accrochent
aux camions. Elles sortent vers cette humanité qui souffre, pour s'asseoir avec
ces gens qui veulent vivre à tout prix.
La mission du chrétien,
c'est dehors. Pour tisser des liens. A Marseille et partout, il y a des pots de
l'Amitié en bas des immeubles, et les chrétiens sont là. Au fond, on sort de
chez soi, de son propre confort, pour faire un travail d'amour.
Quand on sort, on
attrape des coups, forcément. On se heurte au mal, on a mal au monde. Alors là,
sortir veut dire "crier avec ceux qui
crient, pleurer avec ceux qui pleurent."... Il y a donc une manière
chrétienne de faire la fête avec ceux qui sont heureux, et une manière
chrétienne de s'asseoir avec le voisin atteint de leucémie, ou avec ce jeune
qui se bat pour trouver du travail.
Au fond, face à la
Mission, il y a deux types d'Eglises possibles. Il y a l'Eglise qui sent un peu
la naphtaline. Une Eglise frileuse, uniquement préoccupée de ses problèmes
internes, de sa liturgie, de sa théologie. Cette Eglise prend figure de
citadelle assiégée, où le prêtre, du haut des remparts (de la chaire), tire à
boulets rouges sur le monde et ses turpitudes. Pour cette Eglise, pas besoin de sortir; à
l'entendre, ce sont les autres qui doivent venir à elle. Ce sont eux qui
doivent sortir du diable pour entrer dans la Vérité!
L'autre modèle
d'Eglise, c'est l'Eglise décoiffée par le vent du large, à l'image du
regretté Laurent Bourgnon. Cette Eglise
cherche avec passion ce qui est bon dans le monde, elle s'en émerveille comme
le Christ s'émerveillait devant la foi du centurion romain. J'aime bien le
livre de Yann Arthus Bertrand :"Six
milliards d'autres", où l'auteur arpente la Terre pour demander au
mongol, à l'indien, à l'américain :"Et
toi, que penses-tu du bonheur, de la douleur, de l'amour?"
L'Eglise-qui-sort pose
les mêmes questions. Poussée par l'Esprit, elle cherche ailleurs où souffle le
vent de Dieu; elle est attentive à ce que vivent les autres, tous les autres, pas
seulement les chrétiens du coin. Cette Eglise est souvent sale comme dit
François, car elle a mis les bras dans la misère humaine, et jusqu'au coude!
Sortir, c'est revivre
l'Exode. Pas besoin d'aller en Chine pour cela. Témoin ce papa qui rentre à la
maison, fatigué après une journée de travail. Il se carre dans son fauteuil
avec un ouf de contentement, ouvre son journal et... une toute petite voix se
fait entendre , venant du tapis :"Papa, viens jouer avec moi." Et le
papa laisse son journal, il "sort"
vers son garçon pour jouer avec lui.