mardi 10 mars 2015

Dos au peuple!

Rome janvier 2015. Nous avions célébré la messe à Sainte Marie Majeure, dans une chapelle latérale avec - bien sûr - l'autel monumental s'appuyant sur le mur. En enlevant mon aube après la messe, je disais à un prêtre de l'Emmanuel qui en faisait autant :"Cela fait bien 50 ans que je n'avais célébré la messe "dos au peuple"." Et lui de rétorquer :"Mais c'est très bien comme ça! On devrait toujours célébrer ainsi!"
J'en suis resté baba, K.O. debout! Alors il m'a porté l'estocade :"Vous verrez: bientôt tout le monde fera comme ça!" J'étais anéanti, horrifié, pantelant d'indignation. Comment peut-on faire un  rétro-pédalage pareil? Revenir 60 ans en arrière? Bien sûr, que je sache Vatican 2 ne s'est pas prononcé sur la pratique de la célébration, liberté est laissée à chacun. Mais une vision saine de l'Eglise, vision issue du Concile, a rendu normale la célébration "face au peuple". Tout le monde comprend la charge symbolique forte liée à cette pratique. Si la messe est le prolongement de la Cène du Jeudi Saint , a-t-on jamais vu un repas de famille où les gens se tournent le dos? Et surtout, le Christ est présent d'abord dans la communauté qui célèbre (Constitution Lumen Gentium n°14)
Ce prêtre de l’Emmanuel ajoutait :"A la messe, on est tous tournés vers Dieu, devant nous.". Non, en vertu de l'Incarnation, le Christ est d'abord parmi nous. Et ce que cet abbé ne disait pas, c'est que, dans la célébration "dos au peuple", le prêtre se trouve l'intermédiaire obligé entre Dieu et les hommes, comme l'était le Grand Prêtre juif au temple. Et depuis quand les chrétiens ont besoin d'un intermédiaire autre que Jésus pour aller vers Dieu? Va-t-on remettre le prêtre sur le piédestal du haut duquel le Concile l'a fait descendre? 
En relisant le livre lumineux de Jean-Noêl Bezançon :"La messe de tout le monde", on se rend compte de quelles dérives l'Eglise s'est rendue autrefoiscoupable en faisant du prêtre un super-chrétien, et des laïcs de gentilles "brebis" juste bonnes à répondre Amen.
Je crois qu'il faut aller plus loin que l'indignation.  Ainsi je n'hésite pas à appeler les chrétiens à s'insurger contre une pratique qui, au fond, vise à renier le Concile et tout le renouveau que le Concile a voulu donner à l'Eglise. Ne vous laissez pas faire par ces prêtres qui ont une théologie datant du Concile de Trente. Rappelez-leur que la théologie est une science, et comme toute science elle évolue, réfléchit, comprend mieux les choses, va plus loin. Elle est, comme toutes les sciences, capable de progrès. Alors évitons le piège salafiste, ce piège qui serine aux croyants :"C'est le vieux qui est bon." Ne faisons pas comme l'islam officiel, empêtré dans son passé, peinant à aborder positivement la modernité.
Alors ayez le culot de dire non... tout en expliquant les raisons de votre refus. Et excusez ma colère!
Mais je crois que c'est une juste colère.