mardi 29 janvier 2019

5. Purgatoire.




Hannah  Arendt disait que les camps nazis, c’était l’enfer, et le goulag soviétique, le purgatoire. La comparaison est juste : on ne sortait du camp nazi que par la cheminée du four crématoire, tandis qu’au goulag, les gens subissaient une « purge » censée remettre les « coupables » dans l’orthodoxie du Parti, leur laissant ainsi l’espoir d’en sortir un jour, peut être … Le mot purge a donné purgatoire, non ? 

Dans l’idée de purgatoire, il y a en filigrane le souvenir des casseroles que nous avons traînées au long de notre vie : des fautes nombreuses, regrettées mais pas réparées, comme le voleur qui avoue son vol mais  n’a pas rendu ce qu’il a volé. Des rancœurs, des « dettes » comme dit le Notre Père, dettes non réglées, voire des vices bien incrustés. Toutes ces casseroles, même pardonnées à travers la mort du Christ, demandent purification avant que le défunt ne rejoigne les saints du ciel. D'où le pur-gatoire  

On a parlé de purgatoire à partir du 15ème siècle. Mais déjà au 5ème siècle, le grand pape St Grégoire parlait de « feu purificateur ». De plus, soyons logiques : si nous prions pour les morts, cela n’aurait aucun  sens s’ils étaient tous au ciel… ou en enfer !
On pourrait appeler le purgatoire un chantier en cours. Un temps qui dure où l’on fait la vérité sur sa vie passée, et un temps de libération. Je dis bien « un temps qui dure », car on ne s’accoutume à la pleine lumière que progressivement, comme la rétine du chauffeur sortant d’un tunnel ne se fait que peu à peu au jour extérieur. C’est là, dans la belle lumière du ciel, que Dieu nous attend ; alors on se fait propre avant de le rejoindre. En langage chrétien, on dit qu’il faut se purifier. Se purifier ? Encore un drôle de mot. Pensons très prosaïquement au bain de pieds avant de plonger dans le grand bain à la piscine, ou au sas de décompression des astronautes.

Tout cela pour dire que le purgatoire est dans la logique de Dieu et de l’homme ; c’est toujours une logique de pardon… Durant notre vie, nous utilisons toutes sortes de stratégies pour nous cacher à nous-mêmes nos faiblesses et nos tares. Cela fait partie de la comédie humaine. Au purgatoire, sous la lumière de Dieu, les faux-semblants ne seront plus possible … Cela fera mal, mais ce sera comme une piqûre qui sauve. Un peu comme une rééducation après un accident.

Reste l’espérance d’en sortir ! Comme disait le prophète Isaïe :
« Le peuple qui marchait dans les ténèbres, a vu une grande lumière.
Sur ceux qui habitaient le pays de l’ombre, une lumière a resplendi. » Isaïe 9/1

mercredi 16 janvier 2019

dimanche 13 janvier 2019

4. ce que nous appelons l'enfer.



Nous occidentaux, sommes bien carrés dans notre confort. Les immigrés nous troublent un peu, mais on s’y fait ! Alors, pouvons-nous imaginer ce que ces hommes, ces femmes, ces petits ont vécu, ce qu’ils ont vu, ce qu’ils ont traversé ? On  retrouve chez beaucoup les yeux immenses de ceux qui ont trop souffert. Ils ont vécu l’enfer, voilà tout.

On peut bien s’imaginer l’enfer : démons fourchus, flammes, cris désespérés…. En fait, c’est pire : il s’agit d’une séparation éternelle d’avec Dieu et d’avec les autres. Une solitude sans fond… Remarquons que chaque fois que nous cédons à la haine, que nous rejetons des autres, nous amorçons notre descente en enfer. Je ne dis pas ça pour faire peur, mais il faut appeler un chat un chat !

Dans la Bible, Satan a trente-six noms. L’un des principaux est le diable, dia-bolos, celui qui divise. Il a séparé Adam et Eve de Dieu, il est toujours à l’origine de la haine, de la guerre, de toutes ces figures actuelles de l’enfer. Le diable, c’est l’anti-amour.
Certains disent – je l’ai entendu – que l’enfer n’existe pas. En effet, disent-ils, comment le Dieu-Amour peut-il supporter que des gens aillent en enfer ? Ce serait un scandale, comme disait quelqu’un ! A ceux-là je dis : Dieu aime, oui, à la folie même. Mais il nous aime libres, car sans la liberté il n’y a pas d’amour. On dit que Dieu est tout-puissant. Peut-être… Et pourtant il ne peut rien contre notre liberté. Si quelqu’un décide de  s’enfermer dans le mal, ne supportant que lui-même, Dieu n’y peut rien. Cet homme est en train de construire son propre enfer. S’il meurt ainsi, le fossé entre lui et Dieu, entre lui et les autres, continuera. Il restera, ce fossé, par la volonté de celui-là, pas par une « punition » de Dieu !

C’est très important ce que je dis là. Il nous faut tenir d’une seule main  l’amour de Dieu et notre liberté, la puissance de Dieu et notre liberté… Bien sûr, il y a un tas de circonstances atténuantes. La haine peut venir d’une enfance malheureuse, l’égoïsme d’une trop grande pauvreté etc… Si bien que, du fond du cœur, je pense qu’il n’y a pas grand monde, sinon personne, en enfer. Mais si nous disons que l’homme est libre, alors il nous faut envisager l’enfer comme possible, c’est tout. Pas la peine de frissonner ! Tant que l’amour et la liberté seront frère et sœur, l’enfer possible existera.
Peut-être pouvons-nous conclure en montrant comment la séparation d’avec Dieu  peut-être diverse. Dans la vie d’ici-bas, elle est vécue souvent sans états d’âme, même si dans la pratique c’est aussi une séparation d’avec les autres. Mais en enfer, cette séparation sera vécue comme une souffrance éternelle.

Redisons-le : si je passe ma vie à élever des murs, à céder au racisme et à l’exclusion, en un mot à rejeter les autres, je construis mon propre enfer.