mercredi 29 avril 2020

2. Jésus a fait ce qu’il pouvait




            A Noël, on fête l’Emmanuel, ce qui veut dire « Dieu parmi nous. » Foin de père Noël et autres fariboles, Noël c’est la naissance de Jésus. Bon. 

           Mais Jésus n’est pas né n’importe où ni n’importe quand ! En langage un peu savant, on dit qu’il est « situé ». Il y eut un moment de l’Histoire où il arriva. On le dit au début de la nuit de Noël : « C’était au temps de l’empereur Auguste » cher à nos livres d’histoire de l’Antiquité. Et l’évangile de Matthieu commence par une généalogie, avec des noms, un peu biscornus il faut le dire. Mais c’est une façon de dire que Jésus n’est pas arrivé comme un missile. Relisez cette généalogie, c’est impressionnant !
            Jésus est venu dans un coin de la planète, la Palestine, point de jonction de trois continents. On peut visiter Bethléem aujourd’hui, et c’est une émotion de marcher sur les routes de Galilée, même si le bitume a remplace la poussière biblique !
            Tout cela pour dire que le Christ, cet « homme qui marche », celui par qui des aveugles ont vu, des muets ont entendu, cet homme n’est jamais sorti de son pays à part quelques escapades de l’autre côté du Jourdain. D’où une première constatation : Jésus n’a pas guéri tous les malades de la terre, il n’a pas remis sur pieds toutes les femmes adultères, il n’a pas nourri tous les pauvres qui de par le monde traînaient leur misère. Hors de Palestine, de  Jésus point  
            
            S’il n’a pas guéri le monde entier, Jésus a fait ce qu’il a pu, c’est tout. Et c’est déjà  pas mal !   En fait, quand on lit les évangiles, on se rend compte que si Jésus guérit, ce n’est pas seulement par pitié. Il va plus loin que la guérison. Ces muets qui se mettent à parler, ces paralytiques qui se mettent à danser, ce sont des signes. Des signes, mais pas de la toute-puissance de Dieu !  Des signes  de la présence brûlante de Dieu et de son amour pour les hommes. Dans un coin du monde, dans un moment de l’histoire, il y eut cet homme-Dieu qui a fait ce qu’il pouvait pour montrer que Dieu est amour, qu’il n’aime pas voir les gens souffrir. C’est un Dieu qui a de la compassion, comme on dit en langage d’Eglise.
            
             Les signes que Jésus a faits étaient discrets, car il ne voulait pas qu’on le prenne pour un gourou ou un superman. Il défendait aux gens guéris de crier leur guérison. Et quand les gens se moquaient de lui, il s’en allait sans guérir personne.  
              
                Plus loin nous verrons que Jésus n’a pas supprimé toutes  les souffrances de tous  les hommes, mais il est entré lui-même dans la souffrance, et ce faisant il lui a donné un sens.

lundi 6 avril 2020

1. un océan de souffrances

En ce temps de Semaine Sainte, j'ai cru bon d'écrire quelque chose sur la souffrance. D'où  ce n°1 d'une série de réflexions. Bonne semaine!



                   La première impression que la France m’a faite quand je suis rentré d’Afrique : FACILE ! En France, tout est facile. D’un clic tu prends ton billet de train ; il te faut 5 heures de TGV pour faire Marseille-Lille ; tu entres au Super U et tu trouves de tout, absolument de tout ; les routes sont des billards etc.… Et je comparais avec le Nord-Cameroun, où je mettais 2h15 pour faire 25 kms, et en 4x4 ! Les mayos en crue, les coupeurs de route et j’en passe. Et la souffrance des gens ! Ils  se retrouvaient souvent avec le grenier à grain vide. Pas de Sécu, pas de restos du cœur. Quand tu es élève, tu dois affronter l’absentéisme des maîtres et leur corruption ; si tu rencontres les gendarmes, il y a  toujours le risque de te faire détrousser. Et les mamans, la douleur dans les yeux avec l’enfant malade dans les bras, sans espoir car pas de sous pour acheter le médicament… Bref, en arrivant en France, j’avais un peu l'œil du migrant échappant à l’enfer et croyant arriver au paradis !
            Et puis… Et puis je me suis rendu compte qu’ici aussi il y a de la souffrance. Mais une souffrance autre. Souffrance des pauvres en HLM, menaces du burn-out chez les médecins et les hommes d’affaire, solitude de la mère célibataire, angoisse des jeunes face à l’avenir, frustrations… Et Tim Guénard disait : «  Il n’y a pas de souffrance plus grande que celle que chacun vit. »…     La souffrance est partout, elle fait partie de la vie. Et on a beau tout faire pour la gommer, ou la tourner, elle est là. Quelqu’un (Brassens ?) chantait : « Il n’y a pas d’amour heureux. »
            
           Le constat est amer. Un monde dur, mais un monde qui nous pousse à réfléchir : la souffrance a-t-elle un sens ? Pas seulement pour le chrétien, mais pour Mr Toulemonde qui cherche à être heureux et se tape la tête contre les murs ?  Et pourquoi Dieu permet ça ? Et de quel droit mon voisin est heureux et pas moi ?  En fin de compte, il y a davantage de suicides en Europe qu’en Afrique. Le suicide est une façon de répondre à la souffrance. Mais est-ce la seule ? Face au mal-vivre de nos contemporains, n’y-a-t-il que le mur du désespoir ? 
            
         Nous allons essayer d’allumer quelques petites lumières. Elles ne pourront  pas tout résoudre, ni effacer  le poids que  chacun  porte, mais simplement éclairer des points, comme sur une nationale dans la nuit noire.
            « Qui nous fera voir le bonheur » dit le psaume. Mais où est-il ce bonheur ?  Est-ce un mirage comme on en voit dans le Sahel ?