mercredi 18 novembre 2020

3. L'Eglise, pyramide ou roue de vélo?

     Je m’étais donné une mission : faire comprendre aux chrétiens leur place dans l’Eglise et dans le monde. Alors, en compagnie d’un « serviteur de communauté », avatar du diacre permanent, j’ai pris mon bâton de pèlerin, et pendant deux ans, nous sommes allés de communauté en communauté. Le thème était simple : qu’est-ce-que l’Eglise ? à quoi pouvons-nous la comparer ?... Et j’avais trouvé une comparaison géniale : l’Eglise est-elle comme un chapeau pointu de berger peul, ou comme une roue de vélo?

Longtemps, l’Eglise s’est  pensée comme un chapeau pointu, (ou une pyramide). Cela arrangeait  fort bien les grands, princes et clercs. En haut le pape, avec plein d’Esprit-Saint. Normal, il est le plus près de Dieu ! Puis les évêques, avec encore pas mal d’Esprit-Saint. Enfin les prêtres, avec ce qui restait d’Esprit-Saint. Et au bas de la pyramide, les dénommés « fidèles », un troupeau dont la seule tâche était de bêler derrière ses pasteurs... J’exagère à peine ! Cette figure consternante de l’Eglise a prévalu pendant des siècles. Entre nous, je me demande si elle a complètement disparu. 

Mais l’Esprit, c’est aussi la jante de la roue, qui relie les croyants entre eux,  fait d’eux une communion, et anime toute la roue. Voilà l’Eglise !... Dès lors, quand un rayon pète, quand un chrétien faillit, c’est toute la roue qui tourne moins bien ! Quand la jante est fendue, c’est-à-dire quand l’Esprit n’agit plus, l’Eglise est malade…. Voilà ce que nous disions… La parabole était limpide, et les gens comprenaient très vite. Suivait une réflexion sur la communauté chrétienne, ce qui l’anime, son organisation etc…Nous en reparlerons.

Donc, exit la pyramide ! Mais nous prenions soin de compléter l’image de la roue par celle du corps. La roue de vélo, c’est mon invention ; le corps, c’est celle de St Paul dans la 1ère lettre aux Corinthiens. Il faut relire cette lettre pour comprendre que l’Eglise est un « corps constitué ». Chacun y a son rôle, l’archevêque a le sien, la mère de famille a le sien. Le père dominicain ne peut pas prendre la place, ou parler au nom de l’industriel chrétien. Mais si l’industriel veut jouer au père dominicain sous prétexte qu’il a reçu la même dose d’Esprit-Saint, le risque est grand que cela ne marche pas. Tous sont engagés, mais n’importe qui ne fait pas n’importe quoi. Tous sont appelés à construire le même Royaume de Dieu, mais chacun à sa place.

Avec un bémol cependant : dans l’Eglise, il n’y a pas de place retenue ! Dieu peut appeler qui il veut, suivant son charisme, ses dons, pour travailler à son champ. Quand le Concile, ou un Conseil diocésain fait appel à des laïcs, masculins et féminins, ce n’est pas un signe des temps, c’est simplement continuer la grande tradition de l’Eglise ! Voyez les apôtres choisissant un remplaçant de Judas en Actes 1/21-26.

En particulier, il faut toujours faire leur place aux prophètes dans l’Eglise er dans les communautés. L’histoire nous montre qu’être prophète n’est pas une question de sexe, ni de savoir théologique… L’avenir des charismes et des ministères reste donc ouvert.

Pour terminer, soulignons l’importance pour chaque chrétien de se faire une image exacte de l’Eglise. Tant qu’on en reste au schéma pyramidal, on risque de ne plus voir dans l’Eglise qu’une bande de satrapes détestant la contestation, ressemblant fort aux docteurs de la Loi qui condamnèrent Jésus. Nous n’avons rien à faire dans cette Eglise ! Mais plutôt : que chacun trouve, non pas sa place, mais à quel service Dieu l’appelle pour que la roue tourne !