samedi 2 novembre 2013

Pierre Rabhi

Est-ce qu'un village de poètes, ça existe? Je n'en connais pas, et pourtant il semble bien que  ce coin de l'Atlas algérien où est né Pierre Rabhi, en soit un. Un village où le regard de chacun enchante le quotidien, où l'oreille de tous entend le tintement d'un seau sur la margelle du puits comme une musique, où les petits gardiens de chèvres apprennent très tôt à contempler, assis là sur leur rocher à longueur de journée, oubliant parfois de surveiller leurs bêtes. Un village où personne n'a peur du silence, où personne n'essaie de remplir le silence avec un walkman aux oreilles; un village où la beauté entre dans les maisons sans forcer la porte, amicalement.

Pour qu'un tel village existe, il nous faut décider que la beauté existe. Mais la beauté brute, pas celle que l'on invente; celle qui s'offre à nous sans qu'on le demande: la femme qui revient du puits, la cruche sur la tête, ne sait pas qu'elle a une démarche de déesse. Si le pépé assis sur son banc devant sa maison à regarder un  chat se couler dans les herbes, n'existait pas, il manquerait quelque chose à la beauté du village.... Et pour voir cette beauté, il suffit d'ouvrir les yeux, un peu, et le cœur, beaucoup.

Il faudrait que chaque pays ait son village de poètes. Peut-être cela changerait-t-il le monde? Déjà le regard d'un seul poète peut changer tout un groupe, y mettre comme une douceur, y glisser comme une musique. Je me souviens du témoignage d'un pilote de Canadair lors des obsèques de mon neveu à Peypin d'Aigues. Il disait :"Frédéric était parmi nous comme un poète au milieu d'une meute de pitbull."

Et s'il y avait dans chaque contrée, chaque ville, chaque banlieue, cinquante, cent, mille poètes?..