samedi 15 avril 2017

Solide, et libre!


Pour bien comprendre la Résurrection, il faut la rattacher à toute la vie du Christ, avant la Résurrection. Jésus ressuscité n’est pas une météorite, venant de nulle part et allant nulle part ! Non, la vie, la mort, la résurrection, tout se tient. Quand on regarde la vie et la résurrection de Jésus ensemble, on voit deux choses : la solidité et la liberté.

Solidité d’abord : quand on se met à lire les évangiles, on se rend compte tout de suite que c’est du costaud, c’est du concret. Jésus parle de pain, de travail, de charrue... Jésus a solidifié ses apôtres, ou du moins il a essayé de les solidifier. Bon, ça n’a pas tellement réussi quand on voit comment les apôtres se sont débinés à l’arrestation de Jésus. Pourtant Jésus avait dit la parabole de la maison bâtie sur le roc : « Celui qui m’écoute est comme cet homme qui a bâti sa maison sur le roc. La pluie et le vent sont venus, mais ils n’ont pas abattu cette maison. » C’est comme les villages du Vaucluse !... Donc, solidité. Soyons des solides ! L’Evangile, c’est notre solidité.

Et puis liberté. Ça c’est la Résurrection.  Regardons, il y a des signes : le voile du Temple qui se déchire = Dieu n’est plus enfermé dans le Temple. Le tombeau vide (on a parlé l’an dernier de Jésus qui emporte la porte de la mort, libre). Marie-Madeleine : « Ne me retiens pas ! » dit Jésus. Et la rencontre des disciples d’Emmaüs, sur une nationale… Jésus, c’est l’image de Dieu libre, Dieu nomade, Dieu du grand large qu’on ne peut enfermer,
Dieu de l’Esprit qui planait, libre, sur les eaux de la Création.

Alors pour nous, si nous voulons être de vrais chrétiens, il nous faut être à la fois solides et libres ! Pas l’un ou l’autre, mais les deux !
Une image : on connaît les capsules spatiales. Au fond ce n’est pas bien gros quand on les voit dans l’espace. Mais quand on voit l’énorme fusée sur le pas de tir, cette fusée qui booste la capsule, on se rend compte  de toute la logistique qu’il  a fallu pour lancer la petite capsule. Ainsi de la vie du Christ : c’est toute la vie d’amour de Jésus qui aboutit à la Résurrection.
Une autre image : l’éducation chrétienne des enfants. Il y en a qui disent : « Mon gosse, il choisira plus tard. » Mais c’est idiot, ça ne veut rien dire ! C’est comme si le papa disait à son gamin : « Tu sais, tu n’es pas obligé d’aller à l’école, mais plus tard tu choisiras entre médecin ou ingénieur. » Non, si les parents veulent que leur enfant soit libre, qu’ils lui donnent d’abord la solidité que donnent les études.  Après, mais après seulement,  les enfants  choisiront leur métier.

Comment faire pour donner de la solidité à la vie chrétienne? Je vois trois pistes :
1° une vraie connaissance de l’Evangile, partagé, prié, engagé.
2° une ouverture à toute détresse.
3° une éducation personnelle à la liberté. Pas facile, mais absolument nécessaire pour se sortir de tous les esclavages, esclavages personnels, esclavages modernes… Je ne vais pas vous faire un dessin !
Connaissez-vous des gens à la fois solides et libres ? Thomas More, Betty Hillesum, le pape François, Simone Weil…

On n’aura jamais fini de tirer les conséquences pratiques de la fête de Pâques, bien au
delà des œufs en chocolat.


Joyeuses Pâques à tous !

jeudi 6 avril 2017

Eloge de la folie

Si Obélix avait été là ce Dimanche des Rameaux, il aurait certainement dit :"Ils sont fous ces juifs!". C'est vrai: ils acclament Jésus, et cinq jours après ils vont le tuer.... Ils sont fous... Ils ont crié "Vive Jésus" comme on criait "Vive de Gaulle" à la Libération, et puis patatras!
Pourtant une chose aurait dû leur mettre la puce à l'oreille: Jésus monté sur un âne. Car un vrai chef serait venu caracolant à cheval comme Napoléon à Austerlitz. Mais pas sur un âne voyons! En fait, seuls ceux qui possédaient bien leur Bible se souvinrent de la prophétie de Zacharie, citée  par Mathieu :"Voilà ton roi qui vient, plein de douceur, monté sur un âne." L'âne comme monture, c'est le signe du Messie.

Bon, mais à part ce coup de l'âne, aux Rameaux tout va bien. On est contents, les cailloux fleurissent... Et puis cinq jours après, c'est la débandade, le tsunami, l'horreur: ce Messie si beau est arrêté, battu, tué. Alors, pas la peine de le suivre encore. A bas l'imposteur! A bas le tueur d’espérance!

Là, nous entrons en plein dans le mystère du Christ. Car, à bien y regarder, le Christ est fou aussi! Fou à lier... et on l'a lié! Mais fou comme un amoureux peut être fou. Nous sommes tous d'anciens amoureux, ou de futurs amoureux, ou des amoureux actuels.. Quand on aime, plus rien ne compte que la bien-aimée, le bien-aimé. C'est la loi de l’amour fou.

Je me souviens qu'au cours de traversées en montagne, au Nord-Cameroun, je rencontrais parfois des jeunes hommes grimpant pour aller offrir une cruche de bière au papa de leur fiancée. Vingt kilos sur la tête, sur une pente à plus de 20 degrés! Il faut être amoureux fou pour faire ça! 
Hé bien, Jésus est amoureux fou des hommes, de tous les hommes. La preuve qu'il est vraiment fou, c'est qu'il aime les méchants comme les bons. Ceux qui vont le tuer, cette foule hurlante qui hurle sur le Chemin de Croix, Jésus n'a jamais cessé une seconde de les aimer. Il ira jusqu'à dire, sur la croix :"Père, pardonne-leur..."


Voilà le mystère de la Semaine Sainte et de Pâques: l'amour fou de Jésus pour nous. Alors je fais ici l'éloge de la folie. Je n'ai pas encore lu le livre d'Erasme, mais je prends son titre :"Eloge de la folie". Avant lui, St Paul avait dit aux Corinthiens :"Ah! Si vous pouviez supporter de moi un peu de folie!"
Nous sommes, nous chrétiens, des hommes et des femmes d'amour. Et nous pouvons comprendre la folie du Christ. Alors nous sommes capables d'expliquer aux autres qu'on ne peut comprendre la Croix que si on entre, par notre vie, dans la folie amoureuse de Jésus.