jeudi 29 octobre 2020

2. L'Eglise, un signe

 

 

            Allons tout de suite à l’essentiel. Si un homme de bonne volonté me demande : « Au fond, pourquoi l’Eglise ? Chacun n’a-t-il  pas un téléphone rouge pour parler à Dieu en direct ? » Ou bien, comme me disait souvent un ami ardennais : « A quoi ça sert ? » Alors je réponds tout de go : « L’Eglise est un signe. » … Il faut que je m’explique.

             Un signe, ce peut être un objet, un doigt tendu qui me montre autre chose ; en langage ecclésiastique, on appelle ça un « sacrement »… L’Eglise, c’est cela : toute sa valeur, sa carte d’identité, c’est d'être un signe de Dieu, un sacrement. Pas plus, pas moins.

            D’abord, l’Eglise  est signe du Royaume de Dieu qui est déjà là et qui arrive. Son but n’est pas d’être plus forte, plus nombreuse que les autres, avec les plus belles cathédrales, les curés les plus performants, un pape que le monde entier écoute etc… Le but de l’Eglise n’est pas de ramasser le monde entier dans ses filets. Je suis content quand on me dit qu’au Nord-Cameroun, le nombre des paroisses a doublé. Mais je me demande : « Tous ces gens qui affluent, qu’attendent-ils de l’Eglise ? »… Car au fond, l’Eglise n’est là que pour dire à l’homme : « Dieu t’aime et il frappe à ta porte. »  

            Voilà le premier travail de l’Eglise : être signe de l’amour de Dieu, rendre visible l’amour de Dieu pour tous !... Au Nord-Cameroun, il y avait un village que je traversais souvent. Sur le pas de sa porte, un vieux criait quand je passais « Katouli ! Katouli (catholique) ». Un jour je viens m’asseoir à ses côtés : « Qu’est-ce que tu leur veux, aux katouli ? » Et lui de répondre : « Vous les katouli, vous aimez tout le monde. » Le bonhomme avait  saisi le signe !

            Si L’Eglise s’adresse à tous, elle  a donc son mot à dire aussi bien sur le plan social et économique que politique. Aujourd’hui encore, certains passent leur temps à fermer les portes :  islamistes, « America first ! », « Les étrangers dehors ! ».  A l’inverse, l’Eglise – et elle n’est pas la seule – chante l’internationale de l’amour. Alors, quand le pape François, en parlant de la terre, l’appelle « notre maison commune », c’est loin d’être une simple figure de style. Le pape « fait de la politique » et il a raison. Il est à 100% signe de Dieu.  Bien sûr, certains chrétiens sont tentés par le repli identitaire, par un retour de la « chrétienté ». Mais alors hélas, ils ont raté le train !

            Au fond, quand l’Eglise est ainsi signe de Dieu, elle ne fait que continuer le travail de Jésus, tout simplement. Dans l’Evangile, Jésus passe son temps à crier « Abba ! Père ! » Il dit aux hommes que Dieu est leur Père, il ne fait que rassembler les hommes dans l’amour. Prenez la multiplication des pains: ça crève les yeux et les oreilles. Jésus est signe de Dieu qui rassemble, qui nourrit, qui se donne. Et en priant, Jésus disait : « Que tous soient un, comme toi Père tu es en moi, et moi en Toi. » (Jn 17/21).

            Enzo Bianchi disait : « Les non-chrétiens attendent une Eglise qui écoute avant de parler, qui accueille avant de juger, qui aime ce monde avant de s’en défendre. »

            Au 21ème siècle, c’est à nous chrétiens de continuer ce travail d’amour.

 

           

jeudi 15 octobre 2020

1.L'Eglise, une multinationale chahutée

 Nous commençons aujourd'hui une série d'articles sur l'Eglise

1.              En fait, l’Eglise, ça n’intéresse pas trop, du moins en France. Tout juste si l’on hausse les sourcils quand il y a une affaire de pédophilie, ou quand l’Eglise n’apparaît que comme qu’une caste de clercs plutôt pharisiens. Non, j’exagère ! Disons qu’une certaine image de l’Eglise, fausse mais réelle, continue à courir les chaumières. On la considère comme une sorte de multinationale, un peu ringarde, brandissant des interdits, mais à côté de la « vraie vie ».

            Ou d’autres rêvent. Ils rêvent de l’Eglise comme d’un chœur d’anges tout tout près du Bon Dieu. Et les voilà bien marris, voire scandalisés, quand ils s’aperçoivent que l’Eglise est faite d’hommes et de femmes plus ou moins gentils, plus ou moins boiteux. Alors ils se contentent de l’éternel : « Les chrétiens ? Pfff, pas meilleurs que les autres ! » Et ça leur sert d’alibi pour oublier leur baptême.

            Alors ? Alors nous sommes comme ces prospecteurs d’opale en Australie dont on nous parle à longueur de télé. Ils grattent la terre rouge pour dégotter des merveilles !... Peut-être découvrirons-nous qu’il y a des trésors dans l’Eglise, mais – comme dit St Paul – ce trésor est dans des vases d’argile, ou dans des porcelaines chinoises. Ce trésor est tenu par des gens pas plus forts que les autres, mais tous enfants de Dieu et menés par une Force qui les tient debout : l’Esprit de Dieu.

       On ne peut pas tout dire, ce serait trop long
. Sortons cependant des clichés d’une Eglise pleine d’évêques gourmés, de curés prêcheurs et de chrétiens dociles comme des moutons … Cela peut faire hausser les épaules de « ceux du dehors », ça peut les faire rire ! Mais demandons aux plus lucides, à ceux qui cherchent un sens à leur vie, de bien vouloir s’arrêter un moment et de regarder.

            Regarder l’Eglise… Parfois tu es emballé par un  pélé à Lourdes, ou par une belle homélie. Et par moments tu râles ; ou tu es déçu. Alors, avec Sylvie Robert, tu découvriras que l’Eglise, c’est Jésus incarné qui continue. Le Christ continue à vivre dans des tordus, des pendards qui cherchent à vivre les Béatitudes.  Jésus « fait avec », comme on dit chez nous.

            Et l’Eglise se construit en marchant. Le pape François, qui n’est jamais en mal de paroles robustes, précise : « Dans l’Eglise, on retrousse ses manches, on est actifs. L’Eglise est à faire, et pas seulement à regarder de l’extérieur pour la critiquer ou la railler. »

            Comprendre cela, c’est déjà travailler à la santé de l’Eglise.