Jésus bouge là où il y a des gens. Il ne leur demande pas
leur passeport, ni de quelle Eglise ils sont, s’ils pratiquent ou pas. Simplement,
il va là où les gens vivent et meurent, là où ils font la noce comme à Cana, là
où un romain, ce « goy » comme disent les juifs, crie sa détresse
devant la maladie de son gamin, là où la mort a frappé Lazare. Jésus rejoint
ainsi les prophètes de l’Ancien Testament, si proches des exilés de Babylone. Il
rejoint Elie secourant la veuve de Sarepta, il rejoint les prophètes bagarrant
pour les droits des humbles.
Après Jésus – l’histoire de l’Eglise l’atteste – quand les
papes de la Renaissance se vautraient dans l’or et les filles, il y eut
toujours des chrétiens plus gonflés que les autres pour crier : « Et les pauvres ? Et les indiens ? »

Nous ne pouvons pas nous étendre sur tous les
« mouvements » de Jésus. Parlons quand même de la danse. Dans notre
première méditation, je vous parlais de l’Esprit de la Genèse qui planait sur
les eaux. On pourrait traduire : « qui
dansait sur les eaux. » … Jésus a-t-il dansé ? Bien sûr
voyons ! Gamin, il a dû se mêler aux danses des petits sur les places de
Nazareth (Luc 7/32). Et, plus grand, participer à ces « danses bibliques »
si belles, encore en honneur chez les jeunes israélites aujourd’hui.
Ensuite, si vous lisez l’évangile de Marc en continu, vous
serez entraînés dans un rythme qui est comme une danse. « Et aussitôt… De là, il se lève… Il entre… Il
sort, il traverse. »… Mais le triste, pour Jésus, c’est de voir les gens
refuser d’entrer dans la danse ! Ils ne veulent pas danser – disent-ils –
parce que c’est hors des clous ! Vous vous rendez compte ? Manger
avec des traîne-savates, s’asseoir avec les sacripants, parler avec des
« maudits » (Jean 7/49), non non ! Restons dans les clous de la
Loi. Or, ceux-là qui ne veulent pas
danser, Jésus les appelle des sclérocardes, des cœurs rouillés, grippés.
Décidément non, l’Evangile n’est pas un livre de morale. Il
est le rythme d’un homme vivant, présent à tous, chaleureux… et libre !
Jésus est aussi in-saisissable qu’un danseur de flamenco. Personne ne peut
mettre la main sur lui sans qu’il le veuille. En Mc 4/10, les gens vont lui
faire un mauvais parti. Et le texte dit, laconique et
souverain: « Et lui, passant au
milieu d’eux, allait son chemin. »
Enfin, après la Résurrection, les anges passent leur temps à
dire aux apôtres : « Il
n’est pas ici ! » Le Dieu-nomade est ailleurs!