Tout le monde a des yeux pour
voir ! Mais cela ne suffit pas pour s’engager. Chez certains, la vue de la
détresse leur fait le même effet que de l’eau sur les plumes d’un canard. Chez
eux, l’appel des pantoufles est plus puissant.
Non ! Chez celui qui « voit
avec son cœur », il se produit une alchimie assez mystérieuse, une sorte
d’appel intérieur qui le tire hors de
lui-même pour aller vers les autres. L’incroyant dira que cet appel c’est
sa conscience, et c’est vrai. Le croyant ira plus loin, en faisant remonter
l’appel à Dieu. Et il nommera cela « vocation ».
Comment se fait entendre cette vocation
intérieure ? Alors là il y a
autant de types de vocations que d’hommes
et de femmes qui s’engagent. Pour beaucoup, il y a un choc au départ. A l’image de « L’opticien de Lampédusa », de E.J.
Kirby. Ce gentil commerçant, au cours d’une balade en mer, se retrouve en plein
drame : des migrants par dizaines en train de se noyer… Pour notre homme
et sa femme, c’est un choc qui marquera à jamais leur engagement… Oui, à
l’instar de Dieu qui a vu la misère de son Peuple, des gens ne peuvent plus
dormir après avoir vu la peine des autres. C’est tout à leur honneur. Entre
nous, c’est bien l’honneur de l’Europe que de gérer au mieux l’accueil des migrants.
Mais Dieu – ou la conscience – a d’autres cordes à son arc ! Une
lecture, une séquence à la télé, l’exemple d’un voisin, un SDF qui demande un
bout de pain, voire un long séjour à
l’hôpital après un accident, tout peut entraîner une prise de conscience…. Toujours est-il que
personne ne s’envoie tout seul. Il faut toujours un appel extérieur, un concours
de circonstances que les chrétiens appellent providence. Donc restons humbles,
ne jouons pas
les abbés Pierre du monde, mais en secret, remercions celui, Dieu ou un
autre, qui nous appelés. Et si d’aventure nous nous demandons : « Pourquoi moi ? », devinons que
c’est un geste d’estime et un honneur, voire un signe d’amour, que l’on nous
fait.
Je voudrais simplement, pour
terminer, évoquer une sorte d’appel que j’ai vécu et que – je le sais – bien
d’autres ont vécu. C’est un appel puissant, intérieur, entendu - pour moi - une
nuit. Un appel bouleversant qui vous laisse ébloui comme après un beau rêve. Un
appel insistant aussi : j’ai moi-même essayé de le faire taire pendant un
an, en vain. Sans vouloir faire le malin, je l’ai comparé à la fameuse
« nuit de Pascal » telle qu’il la décrit au début de ses « Pensées ». Ou, plus récemment, à la
« Nuit de feu »
d’Eric-Emmanuel Schmitt... Cet appel a décidé de ma vie missionnaire.
J’en témoigne ici, tout en me disant
que les manières de Dieu sont souvent bizarres ! Exactement ce que le prophète
Isaïe devait se dire quand Dieu l’a appelé :
« J’entendis alors
la voix du Seigneur qui disait : « Qui
enverrai-je ? » Je dis : « Me voici ! » Il
dit : « Tu diras à ce peuple : « Ecoutez bien,
mais sans comprendre, regardez bien, mais sans reconnaître !... » …
Pas facile !
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