mardi 17 décembre 2019

4. être vrai

  

            A cette époque où le mensonge devient trop souvent une méthode de gouvernement, où le populisme  consiste à dire, non pas la vérité, mais ce que les gens aiment entendre, il paraît nécessaire de marier le parler vrai au vivre en vérité . Que la parole vienne du cœur ou de la tête, peu importe, elle fait toujours partie de notre vie intérieure. L’homme intérieur aime la vérité, quel que soit le risque.
                   Car au fond, qui sont ceux que l’on appelle les « prisonniers d’opinion » ? N’est-ce pas ceux qui, à l’instar de Pierre et Paul déclarant au tribunal du Sanhédrin : « Nous ne pouvons pas nous taire », osent dire haut et fort ce qu’ils ont sur le cœur, moyennant quoi ils se retrouvent  en taule ? Cette expression « ils disent ce qu’ils ont sur le cœur » est juste. Autrement dit, leur parole vient de l’intérieur, et une force étrange, irrésistible, les pousse à la dire tout fort. Ce parler vrai est à leur honneur, dussent-ils le payer de leur liberté, et trop souvent de leur vie.
            Chez ceux qui cherchent la vérité, il y a comme un sixième sens qui leur fait sentir si tel homme public, ou tel prédicateur, parle vrai ou fait du théâtre !
            
            Pour nous chrétiens, nous devrions faire attention quand Jésus dit qu’il est la Vérité. Qu’est-ce que cela veut dire ?
1° en clair, cela veut dire que la Vérité est devenue quelqu’un. En bon français, on dit bien de quelqu’un qu’il est vrai. Cela veut dire qu’il est dans sa vérité d’homme, droit, digne, libre, que ce qu’il dit correspond à ce qu’il fait. On peut lui faire confiance. Jésus a été cet homme vrai : jamais il n’a dévié de sa mission, jamais il n’a reculé quand il s’agissait de défendre l’honneur de Dieu. Par exemple, chasser les vendeurs du Temple, il faut le faire !
2° Jésus nous révèle la vérité de Dieu. C’est le Dieu du lavement des pieds, du baiser au lépreux, de l’accueil des petits. Ce n’est ni le Dieu-gendarme, ni le Dieu vengeur de l’Ancien Testament. Voilà la vérité de Jésus : pas d’autre Dieu que le Dieu d’amour. Et d’avoir osé ce parler vrai sur Dieu, Jésus l’a payé très cher !

              Conclusion : je peux me poser deux questions regardant ma vie intérieure :
1° suis-je un homme, une femme « vrais », à qui l’on peut faire confiance ?
2° ai-je fait la vérité sur Dieu dans ma vie ? En suis-je resté au Dieu-gendarme qui punit et récompense, ou est-ce que je crois au Dieu d’amour tel que Jésus me l’a montré ? Avec ce Dieu d’amour, quand j’aime, je parle et j’agis « vrai ».


vendredi 29 novembre 2019

3. Beauté



            


            Voilà une chose, la beauté, qui remonte aujourd’hui à la surface des médias grâce à l’engouement pour l’écologie ! Le beau, le propre, le pur, toutes valeurs que nous découvrons après des années de consommation effrénée à l’américaine ! Nous découvrons que vivre sur une terre défigurée, sale, dans un désert d’oiseaux et d’insectes, ça ne va pas, ça ne va pas du tout ... Quand je remonte le boulevard de la Libération à Marseille, et que je passe au milieu de ces tags stupides couvrant murs et portes, ça me rend triste.
            Car la beauté fait partie de notre vie profonde. Que serait le monde s’il n’y avait personne pour l’admirer ? Dieu lui-même, nous dit la genèse, après avoir créé le monde, s’est assis dans son atelier et « il vit que cela était bon ».
            Allons plus loin. La beauté fait partie de nous-mêmes. L’émotion devant un vol de flamants comme devant une statue africaine au musée Dapper, cela fait partie de notre vie intérieure. Et l’émotion est encore plus forte quand elle est partagée ! Devant un coucher de soleil rouge sur les montagnes du Nigéria, un gamin de 12 ans m’avait attrapé par la manche : « Regarde comme c’est beau ! »… J’étais ému autant par le petit que par le soleil ! Le rouge du ciel nous atteignait tous  deux au plus profond de nous-mêmes.
            Je crois que, de plus en plus, nous les chrétiens, nous avons un message de beauté à porter au monde. Aider un autre à admirer, c’est l’aider à sortir de lui-même et à se dire que la vie, au fond, c’est bon et c’est beau… Avez-vous déjà fait l’expérience de regarder les gens au sortir d’un beau film ou d’un beau concert ? Il y a comme une lumière dans les regards ; ils ont tous communié au même enchantement… et ils repartent en se sentant meilleurs !
            Cette beauté, elle vit à l’intérieur de chacun. Marie-Madeleine Davy disait en citant St Augustin : «  Je dis aux étoiles : « Parlez-moi de Dieu ! ». Dans ma contemplation je les interrogeais, et leur réponse c’était leur beauté. » … Notons que celui qui vit en surface, à 100 à l’heure, est peu sensible à la beauté. Il n’en a pas le temps ! Or pour admirer, pour que la beauté atteigne ton cœur, tu dois t’arrêter et contempler. J’ai été souvent frappé par les petits bergers du Cameroun. Du haut de leur rocher,  à quoi rêvent-ils, les yeux emplis de la nature somptueuse qui les entoure ? Ils contemplent, sans même en avoir conscience.
            Entrons dans le franc réalisme du pape François avec son encyclique Laudato si : « Quand quelqu’un n’apprend pas à s’arrêter pour observer et pour évaluer ce qui est beau, il n’est pas étonnant que tout devienne pour lui objet d’usage et d’abus sans scrupule » (n°215)
            Et, pour ne pas rester en mode négatif, le pape ajoute dans un bel élan poétique, au n°84 : « Le sol, l’eau, les montagnes sont des caresses de Dieu » .



jeudi 14 novembre 2019

2. Conscience


« L'œil était dans la tombe, et regardait Caïn. » Dans ce poème sombre et terrible, Victor Hugo s’inspire du livre de la Genèse pour décrire les affres de Caïn après son crime. Et il intitule cela « La conscience ». .. La conscience de Caïn le poursuit, le taraude, l’enferme. Où qu’il aille. Mr Hugo appelle cela « l’œil de Dieu »
Même si l’image que se fait de Dieu Victor Hugo est contestable, il reste que la conscience est bien  cette voix, cette mémoire qui est toujours là en nous, et qui nous interpelle, rudement parfois. Rien de terrible là-dedans ! La conscience est une voix à la fois amicale et insistante qui habite tout homme, croyant ou pas.

Elle est là, bon… Mais qu’en faisons-nous, de cette conscience au fond de nous-mêmes. ? On peut l’occulter, se boucher les oreilles, s’étourdir pour ne pas l’entendre ; on peut même devenir « sans foi ni loi ». Je me souviens de cet ouvrier parisien qui, très sereinement, se vantait de ses conquêtes, et ce devant sa femme. Pour lui, l’infidélité était devenue quasi-normale. Et quand d’aventure il réfléchissait, cela se terminait toujours par le stupide et banal : « Tout le monde fait comme ça. »


Parler de la conscience aujourd’hui, c’est important. Notre conscience anime notre vie intérieure, elle est notre fierté. C’est là qu’est notre liberté. Tout homme comprend ce qu’écrit Hetty Hillesum: « On peut nous rendre la vie impossible (les nazis en l’occurrence), nous dépouiller, nous enlever notre liberté de mouvement, mais on ne peut rien nous faire, vraiment rien ! Je me sens libre. »… Non, rien ni personne ne peut atteindre notre conscience.
          Tant il est vrai que tout papa, toute maman qui veut vraiment éduquer ses enfants à la liberté de  l’âge adulte – si tant est que toute éducation est un apprentissage de la liberté – tout parent donc, sait que son plus beau travail sera la formation de la conscience des petits.
            
        Ça va loin,  ça va très loin. Je le répète : notre conscience, rien ni personne ne peut nous l’enlever ou faire comme si elle n’existait pas. Nous autres chrétiens, nous ne cesserons jamais de crier aux oreilles des dictateurs de tout poil : « Vous pouvez nous brimer, nous enfermer, vous n’aurez pas notre liberté de conscience. » C’est facile à dire ici en France où cette liberté est respectée, mais pensons à ceux et celles qui croupissent en prison encore aujourd’hui, pour avoir osé revendiquer cette liberté.
           En Afrique, en Amérique Latine, le missionnaire emploie souvent le mot un peu barbare de « conscientisation ». Il s’agit d’aider les gens à prendre conscience de leur situation de soumission (aux grands, à la pauvreté, …au destin), pour qu’ils prennent leur vie en mains et se sortent eux-mêmes de leur mentalité d’esclave.
            
         Ici chez nous, ce n’est pas de la soumission aux grands dont il faut se sortir, mais  d’une mentalité d’irresponsables, de béni-oui-oui et d’inconscients qui nous empêche d’être des hommes dignes de ce nom.

mardi 15 octobre 2019

1. surfer

Nous commençons aujourd'hui une autre série de réflexions, cette fois sur la vie intérieure. J'aime bien  Madeleine Delbrel quand elle dit :"Si tu vas au bout du monde, tu trouveras des traces de Dieu. Si tu vas au fond de toi, tu trouveras Dieu lui-même."



En anglais, surf est un terme maritime qui veut dire ressac. D’où l’extension du mot à ce sport, le « surf », où l’on vole sur une planche avec le ressac. Par association d’idées, on peut évoquer  la vitesse, la sensation de planer à la surface de l’eau. Même si surf n’est absolument pas une abréviation de « surface » !
Actuellement, on ne surfe pas que sur l’eau ! On surfe devant la télé, avec le Smartphone, en l’occurrence on dit plutôt zapper… Mais peu importe, nous pointons là une tendance très actuelle où tout va vite, surtout les images ! On zappe, on n’a pas le temps de faire même un arrêt sur image. Voyez comment on illustre les chanteurs à la télé !
Voilà donc un aspect de la vie actuelle. On zappe, on risque de rester à la surface de la vie et des gens… Dans le métro, combien ont les écouteurs aux oreilles, seuls au monde avec leur chanteur préféré. Ils sont là et ils ne sont pas là, c’est leur part de rêve dans la grisaille quotidienne. Et dans trois minutes, ils zapperont encore, à la poursuite d’autres rêves.

Ma foi, je trouve que ça ne va pas, au risque d’être accusé de ringardise ! En surfant, on ne va jamais loin, on s’étourdit, On butine, à l’image de ces papillons qui volent de fleur en fleur, se posant l’espace d’une seconde, à peine. On n’imagine même pas qu’il existe un autre niveau de vie, plus haut, plus profond, le niveau de la vie intérieure. Une vie qui atteint l’âme des choses et des gens. S’arrêter, regarder à l’intérieur de soi, ça demande du cœur, ça demande du temps, ça demande du silence… Où en sommes-nous de ce silence intérieur qui seul nous permet de vivre en vérité et d’atteindre la vérité des êtres ?
Voilà une question grave, qu’il faut avoir le courage de se poser. Sous peine de rester d’éternels papillons, de gentils adolescents qui n’arrivent pas à sortir de leur acné.

Ta vie intérieure, quelle est-elle, et qu’en fais-tu ? Mettons-nous en route. Maurice Zundel disait : « La grande aventure vers l’espace n’est qu’un tout petit voyage par rapport au grand voyage vers nous-mêmes. »

Aujourd’hui, osons nous mettre en marche vers nous-mêmes.

mercredi 25 septembre 2019

7. L’amour ne meurt pas.




La mort et l’amour, cela semble contradictoire ? Car ma foi me dit que l’amour ne meurt pas, qu’il ne peut pas mourir.

Et pourtant, depuis Tristan et Yseult, la littérature nous a habitués à voir la mort et l’amour cohabiter. Et même : l’amour comporte toujours une part de mort, de « mort à soi-même ». Et ce n’est pas du roman ! Le Christ a dit qu’il n’y avait pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime.  Ce lien entre l’amour et la mort nous aide à comprendre le Christ.  Sans ce lien, la vie et la mort de Jésus deviennent une vie et une mort pour rien, absurdes, un échec sans appel.

basilique de Pontmain (Mayenne)
Mais l’amour ne meurt pas. Il traverse la mort, oui, mais il ne meurt pas. C’est pour cela que ma foi me dit que la Résurrection, c’est possible. En disant que Jésus, mort pour nous, a fait sauter les portes de la mort, j’arrive à comprendre que la Résurrection est possible. L’image du grain qui meurt est la plus forte que je connaisse pour nous aider à entrer dans ce mystère de la résurrection. Et, en étant un peu fou mais pas trop, je  me dis que tout don de soi, le mien, le vôtre, celui du croyant comme de l’incroyant, participe de la Résurrection.

Car la Résurrection, nous la vivons dès maintenant, nous la voyons ! Il y a le bonheur, rare, de voir quelqu’un que nous avons aidé se remettre debout et retrouver le goût de vivre. Je dis « rare » parce que le travail pour les autres est souvent ingrat, au ras du sol, avec l’impression de toujours avoir à recommencer. Mais parfois, la joie se lit dans des yeux, un sourire illumine un regard jusqu’alors vide, l’espérance renaît. Un peu comme la joie des gens quand le puits creusé arrivait à l’eau. J’ai même vu   des larmes de bonheur, là au bord de l’eau. Cette joie, c’est   notre petite participation à la Résurrection. Le don de moi-même a fait sauter les portes de la mort. Je devrais dire : le don de nous-mêmes, car on ne travaille jamais seul pour les autres.

Pour terminer ces méditations, j’ai envie de citer ce passage saisissant  d’un livre de Tolstoï, La guerre et la paix : le jeune Pétia s’est lancé dans la bataille de Sébastopol pour aider son pays à lutter contre l’envahisseur, en l’occurrence les français !
« Dans le feu de la bataille, Pétia entend monter une fugue qui devient un chant d’église, qui devient un Te Deum. « Ah mais on dirait que c’est un rêve, se disait Pétia. J’en ai plein les oreilles. Tiens la revoilà hardie ma musique ! Allons-y ! » La balle lui transperce la tête mais la musique continue. Et la fin de cet adolescent ouvre l’outre-monde dans lequel il pénètre avec la joie et l’innocence  de son âge. Il était musique avant sa naissance, il la redevient alors même qu’il quitte sa vie terrestre ; ainsi, il continue cette hymne éternelle qui dit sa présence dans l’univers. »


Oui, la musique de l’amour traverse la mort.



mardi 20 août 2019

6. la mort.




Charles de Foucauld et les moines de Tibhirine
 «  La mort avec sa gueule de raie. »… Oui, la mort fait peur, elle fait peur à tout le monde, même à ceux qui crient « Même pas peur ! ». Or je vais dire quelque chose de terriblement austère ; mais pour notre recherche, il faut la dire ; avec Etty Hillesum (décidément je l’aime !), il faut dire : « S’engager, c’est accepter la mort. »

Là, nous sommes au centre du don de soi, vraiment au centre. La parole de Jésus en Marc 8/38, nous le rappelle : « Si quelqu’un veut me suivre, qu’il prenne sa croix… » Mais il suffit de le regarder, lui Jésus : son engagement-pour-les-autres l’a conduit tout droit à la croix. Il avait envisagé sa mort, mais courageusement il a continué.

Personne ne va à la mort en chantant et la fleur au chapeau ; laissons ce cliché aux va-t-en-guerre des deux dernières. Jésus, lui,  a vécu sa souffrance et sa mort difficilement, avec angoisse à mesure que l’Heure approchait.  Or il l’a fait pour nous.

Mais il y a plusieurs genres de mort ; outre la mort définitive, il y a la mort « à petit feu », à feu doux. Et c’est là que se place le don de soi. Quitter ses pantoufles chaque jour pour aller vers les autres, c’est une mort ! Une petite mort peut-être, mais vécue au quotidien. J’ai déjà évoqué le papa qui, rentrant du travail, trouve son petit garçon qui joue sur le tapis. Fatigué, le  monsieur se carre dans son fauteuil et ouvre son journal. C’est  alors qu’une  petite voix monte du tapis : « Papa, s’il te plaît, viens jouer avec moi ! »  Et le papa lâche son journal et s’assied sur le tapis. Cela n’a l’air de rien, mais voilà ce que j’appelle une « petite mort ». Le papa a sacrifié son fauteuil pour faire plaisir à son garçon.
Il y a une belle expression en français : la maman « se consume » pour ses enfants. Voilà le petit feu ! Sœur Marie-Paula, que j’ai connue au Cameroun, se consumait pour ses lépreux. Elle s’est tellement consumée qu’elle est morte de la lèpre. .. Guynemer avait raison : « On n’a rien donné tant qu’on n’a pas tout donné. »

Pour finir, c’est ainsi que l’on voit vivre Jésus dans l’évangile. Toujours chez les autres, toujours attentif aux autres, toujours prêt à secourir les autres, au point de violer le repos du sabbat : la fille de Jaïre, la femme adultère, l’ami Lazare. Sa vie-pour-les –autres prépare sa mort. Elle est déjà une « mort à petit feu » !

Il ne faut pas dramatiser. Mais soulignons que cette mort quotidienne est aussi une mort par amour. Alors là, ça change tout ! L’amour et la mort sont frère et sœur. Tant qu’on n’a pas  allié les deux, on ne comprendra rien à l’Evangile.

Nous verrons cela la prochaine fois.


jeudi 1 août 2019

5. les perversions du don de soi.



Qu’est-il arrivé à Robert Mugabé, le potentat du Zimbabwé  sorti par un putsch militaire, il y a quelque temps ? De militant pour l’indépendance de son pays, tout donné à « la cause », ayant passé dix ans dans les prisons du pouvoir blanc, il s’est mué peu à peu en tyran sanguinaire ! Après avoir affronté la mort pour lui-même, il a imposé la mort aux autres, et ce pendant des années. Au début, il croyait que pour vivre il fallait accepter de mourir. Ensuite, il a pensé que pour vivre, il fallait faire mourir les autres.
Que s’est-il passé ? C’est un cas extrême, mais typique : le don de soi du jeune Mugabé s’est mué peu à peu en recherche de soi, du pouvoir à tout prix. Comme quoi tout engagement pour les autres peut se pervertir… Dans la Bible, le diable manie la soif de pouvoir avec beaucoup de savoir-faire !

La lutte de Mugabé pour libérer son pays fut-elle gangrenée dès le départ par une ambition démente ? Nous ne savons pas. Toujours est-il qu’à l’instar du dictateur, on peut utiliser son propre dévouement comme une échelle pour parvenir à la gloire, à l’admiration des autres. Bien sûr, dans le don de soi il y a le désir de se réaliser, de donner un sens à sa vie, c’est normal. Mais quand la soif de réussir prend le pas sur l’amour sans calculs, alors casse-cou !

D’accord nos engagements ne sont jamais chimiquement purs, il y a toujours un peu de recherche de soi, de recherche de l’estime de soi. C’est pourquoi il est très nécessaire de s’arrêter de temps en temps, de s’asseoir pour faire le point : « Pour quoi suis-je envoyé ? Est-ce que cela me rend heureux ? Est-ce que je cours trop ? Et la place de la prière là-dedans ? »

J’ai connu des personnes qui agitaient leur dévouement comme un drapeau, un peu à la manière de St Paul. Il faut relire l’étonnante énumération en 2 Cor11/23-26.  Cela me gêne  de dire cela,   car il ne faut pas décourager les bonnes volontés. Mais dans l’engagement, le facteur temps est important. Pour que le don reste authentique, il faut sans cesse se remettre en question, surtout au moment où tu es appelé à prendre de plus grandes responsabilités. Rien de pire que les « fonctionnaires de la bienfaisance » et les don Quichotte du dévouement.
Ça ne va pas, il ne faut pas encombrer les autres avec notre bonne volonté. Et là, nous arrivons à un autre mystère. S’il te faut garder humilité et humour dans le don de toi-même, c’est que ton engagement ne sera vrai que s’il envisage la mort. Voilà : jusqu’à la mort. Mais quelle mort ?